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Viser le sommet

Réfléchir aux embûches que recèle l’écriture d’un roman donne le vertige. On peut se lancer avec insouciance à l’assaut de la montagne, mais il faut du souffle pour la gravir et atteindre la cime. On pense partir avec les chaussures adéquates, avoir prévu tout ce que cette randonnée exige. L’aventure est hasardeuse et ne réserve pas que des joies.

Trekking marche équipement sport
Randonnée en montagne

Au camp de base : la préparation


  • Le conditionnement physique et psychologique : la santé est un vaste sujet. Le désir d’écrire n’est pas suffisant. Le syndrome de la page blanche ou le trop-plein d’imagination compromet le démarrage. Force est de constater que des mois de travail assis causeront des ennuis à la longue. Les refus répétés d’éditeurs minent le moral.

  • Un bagage incomplet : une planification sommaire, un genre incertain, un objectif flottant, des priorités mal cernées (famille, boulot, soi-même), une absence d’intention claire, une idée initiale qui se conjugue en retours dans le passé, en sauts périlleux entre diverses époques, des lacunes grammaticales et orthographiques.

  • L’équipe : des personnages principaux et secondaires non définis ou peu cadrés, mal outillés pour supporter le déroulement logique de l’intrigue. Ne pas s’interroger sur leur psychologie et leur caractère occasionnera une impression de flou et empêchera le lecteur de s’attacher à eux. Plaquer des archétypes (modèles universels appartenant à l’inconscient collectif, exemple le bon et le méchant) crée la caricature.

  • Les cartes et les itinéraires : trop d’idées diverses, rassemblées à la hâte, connectées sans lien solide, en mal de sentiers balisés, d’informations utiles pour surmonter les obstacles et prévenir le découragement.


Le premier jour de l'ascension : le passage à l'action


  • Accrocher le lectorat dès le premier chapitre représente un enjeu. On ne pose pas le pied n’importe comment sur la route. Mieux vaut adopter la foulée convenable pour s’assurer d’attirer de nombreux randonneurs. Un départ sur des chapeaux de roue suivi de péripéties à tombeau ouvert déroute tandis que la lenteur, souhaitable en prose poétique, déçoit et irrite selon le type de littérature envisagé.

  • Amorcer la montée sans avoir fixé un point de vue narratif. Varier la narration, tantôt omnisciente tantôt alternative entre un personnage et un autre, tantôt issue des réflexions intimes de l’auteur se compare à de multiples voies qui s’ouvrent sans indication pour s’y retrouver.


Les heures subséquentes : le rythme


  • La progression ne peut se passer d’arcs narratifs et de sous-arcs narratifs tant pour l’histoire que pour le cheminement des protagonistes : élément déclencheur, développement avec des grimpées et des redescentes vers une tension maximale, dénouement. Comme pour la marche en montagne, il faut franchir des dénivelés avant d’accéder à crête[1].

Les arcs narratifs suivent 1) l’évolution de l’intrigue, l’écoulement du temps et les épreuves couronnées de succès ou non, 2) celle du héros ou de l’héroïne, sa métamorphose intérieure jusqu’à l’accomplissement de son but ou sa mission.

  • L’équilibre entre descriptions et dialogues : décrire un lieu que l’on n’a jamais visité, établir une correspondance entre paysage, émotions et gestes posés, associer l’ambiance d’une saison aux états d’âme, enchaîner avec des échanges pertinents qui s’insèrent avec naturel.

  • Le perfectionnisme, la paresse ou le débordement d’énergie : avancer à pas de tortue au risque de faire du surplace, perdre de vue la cible à force de procrastiner ou s’élancer tête baissée sans garder l’œil sur la destination.


Quand la charge mentale s'alourdit : repos !


  • Santé psychologique : stress, frustration, blocage, isolement et conflits avec les proches, devoirs et loisirs négligés.

  • Santé physique : pas assez d’exercice, de sommeil et carences alimentaires.

  • L’histoire s’embrouille, l’intérêt s’épuise, l’horizon s’obscurcit.

  • Maladresses : Trop de renseignements didactiques, de redondance, de vocabulaire ampoulé, de clichés et d’expressions communes, de temps de verbe inappropriés, des conversations et des discussions qui ne collent pas aux personnages (leur culture, leur attache sociale, leur origine régionale, leurs affects, etc.), ajouté à l’abus de ponctuation (points d’exclamation, d’interrogation et de suspension) ou de virgules inopportunes.


Près du sommet : le manque d'oxygène


  • Ne pas savoir quand s’arrêter.

  • Ne pas se plier à l’étape de relecture et de réécriture qui requiert plusieurs itérations, ne pas souffrir la critique.

  • Échouer à fournir à l’ensemble une harmonie qui retienne le lecteur jusqu’au bout.


Transposition du processus en image


Cette métaphore des écueils qui guettent l’écrivain inspire la transposition du processus en image afin de le pourvoir d’une méthode efficace. Jane Smiley, romancière américaine, a imaginé une pyramide en trois paliers : l’habileté à manier la langue comme fondement, l’intrigue et les personnages sur le deuxième avec davantage d’importance accordée ou non à l’une ou aux autres, les thèmes (un ou deux, ou plusieurs) et les décors en renforcement, la complexité tout en haut, reposant sur les niveaux inférieurs qui demandent plus d’effort pour la soutenir[2].

1er niveau : langage, 2e niveau : histoire et personnages, 3e niveau : thème et décor, 4e niveau : complexité
Pyramide de Jane Smiley

Des images de structures et d’étapes, il en existe de sortes[3].


1ère étape : Trouver l'idée, 2e : Personnages et résumé, 3e : plan, 4e : premier jet, 5e : réécriture, 6e : relecture, 7e : corrections, 8e parution
Le roman en 8 étapes

Les plus traditionnelles considèrent que la ligne directrice la plus confortable applique le principe suivant : un statu quo vécu par un personnage, un événement qui bouscule le quotidien, le doute, le motif qui provoque l’action, une intensité qui culmine, la résolution de la difficulté.


[4]

1) exposition 2) conflict 3) raising action 4) climax 5) falling action 6) resolution
Diagramme de Courtney Meznarich

[5]

1) Titre 2) situation initiale 3) élément déclencheur 4) péripéties 5) situation finale
Schéma du récit

Il existe aussi la pyramide en trois actes[6]

Acte 1 : mise en place, acte 2 : confrontation, acte 3 : résolution
Pyramide en trois actes

ou encore celle en cinq actes de Gustav Freytag[7].


Acte 1 : l'exposition, acte 2: incident déclencheur et complications, acte 3 : tension culminante, acte 4: inversion, suspense final, acte 5 : dénouement
Pyramide de Gustav Freyta en 5 actes

De retour à la base


Chaque roman est une nouvelle montagne à escalader et à redescendre. Avec un équipement de qualité et les bons compagnons, on en revient sans trop de courbatures et d’ampoules aux pieds, enthousiaste du prochain départ vers un nouveau sommet!



[1] 6 structures ou schémas de récit à connaître : quel plan pour un livre ?

consulté le 3 avril 2024

[3] GUILLEMAUD, Lynda. Planifier l’écriture de son roman, https://lespacedudehors.fr/planifier-lecriture-de-son-roman/

[4] MEZNARICH, Courtney. Diagramme de tracé ― Définition, éléments et exemples, publié le 12 octobre 2023, https://www.socreate.it/fr/blogs/ecriture-de-scenario/diagramme-de-trace---definition-elements-et-exemples

[6] YLISS, Jeane. Guide de rédaction : écrire un roman en 7 étapes. https ://jeanneyliss.fr/bl6g/lire-et-ecrire/90-ecrire-roman-sept-etapes/

[7] La pyramide de Freytag ou la structure en 5 actes, publié le 17 février 2015, https://www.scenarmag.fr/2015/02/17/la-pyramide-de-freytag-ou-la-structure-en-5-actes/


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